Honduras : entreprises, taxes et militaires

Sous la présidence de Lobo le business se porte bien merci. Les franchises des chaînes étrangères de fast-food vont certainement se voir à nouveau exonérées d’impôts durant dix ans, les anciens militaires putschistes sont nommés à la tête des entreprises de l’état et à San Pedro Sula (capitale économique) les embouteilleurs paient l’eau vingt fois moins cher que le commun des mortels.

Tout va pour le mieux.

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Sous la présidence de Lobo le business se porte bien merci. Les franchises des chaînes étrangères de fast-food vont certainement se voir à nouveau exonérées d’impôts durant dix ans, les anciens militaires putschistes sont nommés à la tête des entreprises de l’état et à San Pedro Sula (capitale économique) les embouteilleurs paient l’eau vingt fois moins cher que le commun des mortels.

Tout va pour le mieux.

Restauration rapide, déjà 10 ans d’exonération fiscale, mais ils en veulent plus !

Dès 1999 les chaînes de restauration rapide ont pu jouir de la Loi d’Encouragement au Tourisme (LIT) qui les a exonéré de taxe fiscale au Honduras.

La Chambre de Commerce et d’Industrie de Tegucigalpa (CCIT) plaidera devant le Congrès National afin que les franchises McDonald’s, Burger King, Popeyes, Subway, Quizmos, Little Caesars, Chili’s, TGI Friday’s, Applebee’s, Dunkin’ Donuts, Pizza Hut, et Dunkin’ Donuts continuent à jouir de ce privilège, ce qui entrainerait une perte annuelle d’environ 40 milliards de lempiras pour l’état hondurien, soit un peu plus d’un milliard et demi d’euros.

Aline Flores, présidente de la CCIT (Photo : Revistazo)

La LIT a été appliquée grâce au décret n°314-98 publié le 23 avril 1999, qui établit, entre autres choses, qu’à partir de leur création des entreprises pourront bénéficier d’une exonération d’impôts durant 10 ans, et ce afin de favoriser le développement touristique du pays. Cette loi s’applique également aux franchises de restauration rapide mais curieusement pas aux entreprises locales qui travaillent dans la même branche. Pour les entreprises honduriennes cela a toujours été une concurrence déloyale, “qui vient seulement accélérer la faillite des petites entreprises qui doivent payer pour exister", déclare Martiza Berlioz, propriétaire du fameux établissement de la capitale “Burger Hut“ et qui a été victime de ces désavantages compétitifs.

La destruction économique provoquée par le passage de l’ouragan Mitch sur le Honduras en 1998, la nécessité d’actions stratégiques pour viabiliser la reprise économique du pays, la stimulation de l’afflux de touristes étrangers ont été certains des aspects que les députés du Congrès National ont pris en considération pour approuver à la Loi d’Encouragement au Tourisme (LIT) au Honduras.

De la même manière le fait de permettre une participation plus équitable des communautés accueillant le tourisme dans le pays et la planification de services compétitifs facilitant l’affluence des voyageurs vers des destinations nationales étaient d’autres points qui ont été considérés et qui ont été inclus dans le décret.

Favoriser le développement de l’offre touristique dans le pays, était l’objectif primordial de la loi, dans sa formulation est énumérée la série d’entreprises qui peuvent accéder aux aides.

Qui est-ce qui nous exonère ? ce fut l’une des questions que Berlioz a formulées dans un précédent entretien avec Revistazo.com. La chef d’entreprise a fortement remis en cause la déloyauté des législateurs honduriens qui ont insisté pour permettre que des entreprises de fast food comme Burger King, Pizza Hut, Church´s Chicken, Litlle Caesar, Popeyes, Pollo Campero, entre autres, puissent s’établir sans payer d’impôts.

On ignore si cela a été à cause de la série de protestations et de réclamations de la part des entrepreneurs honduriens ou de la part des municipalités qui rencontraient un manque à gagner important qu’il a été décidé d’exclure plusieurs sociétés de la LIT.
Ce qui est certain c’est que le 5 juin 2002 les entreprises de restauration rapide, de transport terrestre et les écoles de tourisme ont été exclues de la liste des bénéficiaires de la loi.
Cependant l’une des contestations qui avait été faite alors était que durant le temps d’application de la LIT version souple, les entrepreneurs avaient réussi à y inscrire plusieurs de leurs commerces, les autorisant ainsi à bénéficier de l’exonération pour les 10 années suivantes.

Le sujet revient sur le devant de la scène quand le temps des exonérations arrive à son terme.

La semaine précédente, les autorités de la Chambre de Commerce et d’Industries de Tegucigalpa ont annoncé qu’elles "plaideront" face aux députés du Congrès National pour que les chaînes de restauration rapide ne soient pas imposées par l’État et continuent de jouir de cet avantage.

En substance la Présidente de la CCIT, Aline Flores, a fait cette surprenant déclaration au médias : “on ne peut penser retirer cette exonération ni à l’industrie touristique, ni aux maquiladoras parce qu’elles sont fondamentales pour la croissance et notre développement”.

Flores a aussi annoncé qu’elle gérera l’approbation d’une série d’initiatives pour compenser la détérioration financière que ces secteurs subissent actuellement. Pour couronner le tout, la présidente de la Chambre de Commerce s’est aussi prononcée contre une augmentation du salaire minimum parce que les entreprises “ne peuvent pas faire face avec en même temps leurs coûts et une augmentation du salaire minimum, cela reviendrait à les pousser à la faillite et nous ne voulons pas faire cela”.

Beaucoup de tentatives ont été faites à l’intérieur de la Chambre Législative pour freiner ce qu’on peut considérer comme un abus des groupes de pouvoir. Le paquet le plus récent débattu dans l’hémicycle législatif, celui que l’ex-Ministre des Finances Gabriela Nuñez a présenté durant le gouvernement de facto de Roberto Micheletti Baín.

Dénommé “Justice et renforcement fiscale”, le projet présenté par Nuñez, avait comme intention de garantir l’équité du système d’imposition. Il envisageait de retirer tous les privilèges aux franchises de restauration rapide du Honduras. Cependant, la pression patronale fut la plus forte et le projet fut remisé dans un tiroir.

L’annonce des industriels doit être soumise à l’analyse des membres du Congrès, dans un contexte de crise économico-financière qu’on prétend combler avec de sévères impôts pour la communauté hondurienne.

Mais pourquoi exclure ceux qui forment l’oligarchie hondurienne ?
Et plutôt que la masse des dépossédés, et-ce que ce ne serait pas à eux de verser les 40 milliards de lempiras que l’État s’apprête à ne pas percevoir du fait de l’exonération fiscale faite aux franchises de la restauration rapide ?

Les militaires putschistes nommés à la tête des entreprises d’état

Le 8 mars dernier le président hondurien, Porfirio Lobo, a nommé Romeo Vásquez Velásquez, ex-chef d’état-major des Forces armées, comme nouveau gérant de l’entreprise Hondurienne de Télécommunications (Hondutel).

L’ex-général a participé à l’arrestation et l’expulsion de l’ex-président Manuel Zelaya Rosales le 28 juin 2009. Vásquez Velásquez a été un acteur clef dans le coup d’État hondurien, qu’après il ait été suspendu par la Cour Suprême de Justice avec 5 autres militaires. Cette nomination est une lamentable reconnaissance donnée à une personne qui a attenté au système démocratique hondurien.

Romeo Vásquez Velásquez commandait les forces armées quand des violations graves et massives ont été commises sur la population hondurienne. Depuis le 28 juin plusieurs médias ont été perquisitionnés d’une manière illégale. De plus, étant donné que ces faits n’ont pas cessé, la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) a adopté des mesures de protection pour garantir la liberté d’expression du Canal 36, Radio La Catracha, Cholusat Sur et Radio Globo, et a ordonné de rendre les équipements de travail et de transmission que les soldats et les policiers avaient confisquées le 26 septembre 2009.

Durant les mois suivant le coup d’État, l’Armée a attaqué les civils, elle a réprimé des manifestations et elle a harcelé des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, entre autre. Un exemple de ces violations graves des droits de l’homme, a été la mort d’Isis Obed Murillo Mencías, âgé de 19 ans, mort des suites d’une blessure par balle à la tête durant la manifestation à l’aéroport Toncontín, Tegucigalpa. Cette manifestation organisée lors de la tentative de retour de l’ex-président Zelaya avait été réprimée par l’armée, dont les tireurs d’élites étaient disposés dans des bâtiments voisins de l’aéroport.

La CIDH a signalé dans sa publication "Honduras Informe : droits de l’homme et coup d’État", que “durant l’application du couvre-feu, des agents de l’armée ont intimidé la population afin qu’elle ne sorte pas des maisons et ont arrêté des personnes sans ordre judiciaire.” Dans le rapport de la CIDH diverses violations des droits de l’homme commises par les membres de l’armée ont été rapportées. Armée qui à ce moment là était dirigée par le général Vásquez.

La décision du président Lobo d’attribuer ce poste au militaire semble être un mauvais précédent et met en doute son engagement envers la démocratie et le respect des droits de l’homme. Romeo Vásquez doit être jugé pour les violations graves des droits de l’homme que l’armée a commis tandis qu’il la commandait. Cette nomination est une carte blanche pour l’impunité, et diminue de plus en plus les possibilités que soient identifiés, accusés et jugés convenablement les responsables de ces faits.

Étant donné que la nomination de Romeo Vásquez dépend exclusivement de l’Exécutif, le CEJIL exhorte le président Porfirio Lobo à révoquer une telle désignation et à s’abstenir de réaliser ce type d’actions qui récompensent ceux qui ont occupé des positions de pouvoir au moment des violations des droits de l’homme. La situation du Honduras est critique et le président doit donner l’exemple de sont engagement avec le renforcement de l’État de droit. Malheureusement, des actes comme celui-ci mettent en doute une telle volonté.

Le Centre pour la Justice et le Droit international (CEJIL) est une organisation de défense et de promotion des droits de l’homme sur le continent américain. L’objectif principal du CEJIL est d’assurer la pleine implémentation des normes internationales des droits de l’homme dans les États membres de l’Organisation des États Américains (OEA), grâce à l’usage effectif du système interaméricain des droits de l’homme et d’autres mécanismes de protection internationale. Le CEJIL est une organisation non gouvernementale à buts non lucratifs ayant un statut de consultant social à l’OEA et à l’ONU et celui d’observateur à la Commission Africaine des Droits de l’Homme.

A San Pedro Sula, les entreprises paient l’eau vingt fois moins cher que les particuliers

(Photo : Vos El Soberano)

Les plaintes pour que les industries des rafraîchissements, produits laitiers, eau en bouteille, maquiladoras et d’autres entreprises paient un tarif équivalent à celui que paie tous les abonnés à l’eau potable commence à résonner fortement dans la tête des sanpedranos [1].

Le conseiller municipal Aníbal Kelly a exhorté les industriels qui dépensent jusqu’à “100 000 mètres cube d’eau dans le mois” pour l’élaboration de leurs produits, à payer le tarif général auquel sont soumis les abonnés.
Ces entreprises paient à peine 35 centimes de lempira le mètre cube, tandis que les sanpedranos paient 7 lempiras pour la même quantité d’eau.

Le fonctionnaire a aussi dit que les rapports présentés aux réunions du Conseil Municipale sur les investissements pour la maintenance des égouts des canalisations de la ville par l’entreprise concessionnaire “n’ont rien à voir avec la réalité que le peuple vit”, parce que dans beaucoup de communautés “les gens boivent de la boue”, a regretté le conseiller municipal.

Comme cela arrive à la Cofradía où “l’égout se déverse directement dans la rivière la Mancha Guala sans aucun type de traitement, puis ces rejets finissent dans la rivière Chamelecón” a assuré le conseiller municipal.

Aníbal Kelly voit avec indignation que Aguas de San Pedro a récemment sollicité une augmentation du tarif de l’eau pour les usagers, sans chercher à modifier les tarifs industriels.

À la réunion du Conseil Municipale une commission a été nommée pour enquêter sur les puits clandestins d’eau qui existent à plusieurs endroits dans la capitale industrielle et qui fraudent le fisc. Il est estimé que ces puits clandestins entraînent une perte de 60 millions de lempiras par an pour la municipalité, soit environ 2 304 000 d’euros.

Source :
Revistazo "Comidas rápidas : ¡10 años de exoneración fiscal…pero van por más ! "
CEJIL "Preocupa a CEJIL nombramiento de ex general del Ejército hondureño como gerente de empresa estatal"
Vos El Soberano "Sólo 35 centavos por metro cúbico de agua pagan industriales."
Traduction : Primitivi


[1Sanpedranos : habitants de San Pedro Sula.

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